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Le « pavillon » de Mangeat pour l'Expo de Séville : une architecture de fête

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De nombreux lecteurs nous ont demandé la traduction de l'article du professeur Werner Oechslin sur le projet de Vincent Mangeai pour l'Exposition universelle de Séville en 1992. La voici:

qu'éphémère. Le tout est enfin enveloppé par une coupole de lumière projetée sur le ciel, signe incontestable d'une tradition séculaire. A tous les critiques qui se heurtent en général à la possibilité d'une architecture d'exposition universelle, on aimerait dire qu'on a trouvé ici pour la participation suisse, une forme moderne, représentative de notre époque, claire et sans équivoque, en renonçant aux messages chauvins. Le choix d'une équipe de représentants du monde du cinéma, de la lumière, de la musique et du théâtre pour la partie «animation et spectacle», donne l'assurance que le tout sera enveloppé d'une ambiance de réjouissance sans sentimentalisme, contribution incontestable à l'architecture de fête. Prof. Werner Oechslin, EPFZ

Le « pavillon » de Mangeat pour l'Expo de Séville : une architecture de fête Les expositions universelles ont écrit une grande part de l'histoire du XIXe siècle et pas du XXe siècle. Ce n'est pas étonnant. La croyance au progrès, l'optimisme, le succès économique en tant qu'objet de représentation de soi et un nationalisme fortement développé dans le jeu de la concurrence entre les nations industrielles ne sont plus très gratifiants actuellement. Le progressisme naïf a vécu depuis longtemps, le nationalisme reste au moins discret et il est remplacé par des symboles. L'économie s'est créé sa propre dynamique. Les indices «nationaux» deviennent accessoires et cèdent généralement le pas aux critères opportunistes. Vue sous cet angle, chaque «foire industrielle» est donc plus importante que les expositions universelles ou nationales revitalisées pour quelque raison que ce soit et dans lesquelles on reconnaît, pas tout à fait à tort d'ailleurs, des résidus d'une forme et d'une expression culturelle propres au XIXe siècle. D'une manière générale, on pourrait en dire autant d'une présentation du caractère national suisse pour lequel de tels objets étaient en principe prêts. Depuis 1964 au plus tard, on s'est efforcé à la modestie lors des expositions nationales et lors de notre participation aux expositions mondiales, on a permis à l'autocritique de s'infiltrer d'une manière plus ou moins convaincante ou l'on a même fait échouer des projets ambitieux, comme dans le cas de la CH 91. Si l'on prend en compte cette toile de fond, on s'aperçoit que le projet de Mangeat pour l'Exposition universelle de 1992, à Séville, que l'on a critiqué très rapidement (comme tout ce qui a été proposé à ce propos au cours de ces dernières années) et sur lequel on a passé un peu hâtivement en partie, se meut très bien sur la glace vive de notre propre présentation nationale. Le titre «Swice» «sent» un peu trop ostensiblement l'agence de publicité. Néanmoins, il est important de relever que l'on ne présente pas le Cervin - le jury officiel parle du renoncement aux clichés - mais qu'on projette une colonne de glace, une métaphore suffisante pour déclencher des associations d'idées correctes chez le visiteur avisé, et sans conteste une expression artistique moderne de notre époque. A l'instar d'un nouveau cliché, les organisateurs prétendent que cette expression présente la Suisse quant au fond (ce qui est un peu bienveillant pour un pays qui, en matière d'architecture, se noie dans la dispersion et le Heimatstil de tout acabit!). Seul l'architecte fournit dans son projet la «garantie» d'une Suisse moderne. V. Mangeat s'appuie d'une part sur la tradition de la conception des formes constructivistes modernes dont l'actualité sous le signe du «déconstructivisme» ne sera pas commentée plus avant ici. Sur les croquis et d'après les prototypes, le monument de Tatlin destiné à la 3e Internationale ressemble jusqu'à présent à la tour de Babel. D'autre part, l'architecte bouscule de manière convaincante et à juste titre la tradition de l'architecture éphémère. Celle-ci a étayé et inspiré depuis toujours l'architecture des expositions. Et ce n'est qu'ainsi - sous forme de contresens et de surprise - que s'explique cette structure de glace dilapidatrice sous la chaleur de l'Andalousie. Le caractère de fête est suggéré en outre par la manifestation elle-même. Part du projet, le tableau (fictif) montre bien à quel point l'architecte accomplit cette opération discrètement. Au centre, comme un symbole se dresse la tour de glace et ses échafaudages «constructivistes», parents de l'architecture éphémère. Les autres éléments de construction, dispersés, sont nettement secondaires. A l'avant-plan à droite, un dresseur de chevaux juché sur un socle moderne supporté par une colonne (dans la ligne de la statue de Le Corbusier pour son projet du Palais de la Société des Nations) invite à entrer dans le tableau. Diverses autres parties de l'exposition sont esquissées comme décoration mobile et accentuent le caractère d'une architecture de fête aussi spontanée

A l'heure où nous mettons sous presse, le verdict des Docteurs en Thermomètre vient de tomber: la Faculté désapprouve le projet Mangeat pour quelques calories en supplément et veut imposer un régime de cheval: l'exposition de Séville devrait être privée de dessert, pardon, de son beau glacier suisse, et qui plus est, pour l'exemple, afin d'éviter que cela ne devienne un prétexte à goinfreries calorifiques de toutes sortes. Mine de rien, cette attitude de carême-prenants incapables de distinguer les jours de fête de ceux de labeur et de donner un panache certain à ta liesse générale dévalorise en plus le concours. Le public ne s'embarrasse pas de subtiles différen ces professionnelles. Après toutes ces péripéties, ce que l’on retiendra dans les chaumières, avec le schématisme légendaire qui y règne, c'est que les concours ne sont que l'occasion de morceaux de bravoure d’opérette, bref, une sorte de mascarade à vocation honorifique, impropre à donner le jour à un résultat concret, et le jury une amusante et futile commission créée pour être contrée par d'autres commissions. Et l'on entend déjà reprendre en chœur la ritournelle bien rôdée chantant que le concours est donc un exercice coûteux puisque inutile, parce que sans suite utili sable. C’est, par les temps qui courent, l'excellente idée qu'il fallait à grand renfort de propagande, mettre dans la tête des grincheux en la clamant depuis les rostres. A qui profitent ces coups de théâtre moliéresques où la seringue à clystère pointée contre les idées novatrices tient le rôle principal? La rédaction