Architecture Suisse est un objet éditorial hybride qui par son contenu se place à cheval entre ce qu’il est convenu d’appeler une Revue d’architecture et ce qui pourrait être nommé un recensement. Il vaut la peine de s’arrêter un peu sur ce terme emprunté au latin et signifiant en premier lieu passer en revue et pour lequel le Dictionnaire historique de la langue française précise le sens en : faire l’examen. Cet examen est en cours depuis 45 ans et se caractérise par l’unité de la matière : ce qui se construit en Suisse et par l’unité de sa rédaction qu’il est permis désormais de dire dynastique.
On peut affirmer que le recensement auquel se livre Architecture Suisse depuis tout ce temps, constitue désormais un ensemble dont l’étendue, la qualité et l’importance numérique des objets publiés forme de facto une archive. Cette archive est ouverte dans la mesure où elle se continue, mais comme telle, elle commande une approche spécifique. Il ne suffit plus de prendre connaissance, constater, se réjouir ou regretter que tel ou tel objet ait été pris en considération et soit présenté selon le standard d’intelligibilité nécessaire et suffisant qui rend la publication reconnaissable au premier coup d’oeil. Ces caractères se détournent par principe de toute idée de hiérarchie, gardent une distance par rapport aux modes qui ont fait tour à tour accepter ou rejeter telles ou telles architectures et qui ont fondé ce que Jean-Marc Lamunière nommait l’effet revue. Il signalait par cette expression sa capacité à lire aussi bien ce qu’elles comprenaient et ce qu’elles ignoraient délibérément. Il est possible après presque un demi-siècle d’existence, d’accumulation, d’appliquer à Architecture suisse , les attentes, la lecture et la méthode que commandent son caractère proprement monumental et il faut aussi se réjouir de l’extraordinaire longévité d’une unique volonté éditoriale appliquée à une matière si dense et si étendue.
On nous pardonnera dès lors de consacrer les derniers signes de cette modeste notice à des voeux sincères de longue vie !
Pierre Frey, Prof. Honoraire EPFL