En tant que directeur du laboratoire des constructions en bois, IBOIS, de l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne, j’essaie de prendre en compte les liens fondamentaux existant entre l’art et la science, ainsi que les contraintes spécifiques des phénomènes observés et leur mise en oeuvre concrète. Cette approche tient compte des exigences mécaniques de la forme et de la structure en les considérant comme des attributs qui ne peuvent avoir une signification et un sens complets que dans le contexte du phénomène géométriquement mis à l’échelle duquel ils dépendent. Je considère l’utilisation de la représentation numérique de l’architecture comme un outil précieux qui a pour objectif de renforcer l’intégration de la structure, de la forme et du matériau au sein de notre concept de design. Cependant, la modélisation numérique ne peut pas remplacer l’étude de la réalité physique, élément crucial lors de la conception de la forme et de l’espace et de la structure les intégrant.
L’époque moderne a vu naître des projets d’ingénierie civile quittant la sphère des géométries classiques ou euclidiennes. L’outil informatique émergeant permet aujourd’hui de créer des formes définies digitalement, dont on ne domine pas forcément le descriptif analytique et pour lesquelles une description des surfaces géométriques générées est difficile, voire impossible.
Avec l’émergence des nouveaux outils, la question du rapport entre forme et structure a été bousculée et elle réapparaît avec d’autant plus d’actualité. Aujourd’hui, la motivation du concepteur peut varier : une structure recherchée doit-elle être optimisée formellement ou, au contraire, une forme convoitée doit-elle être décomposition de la forme globale. En effet, en architecture et dans la construction en général, il est nécessaire de subdiviser la forme d’une toiture par exemple en sous-ensembles afin de pouvoir la construire. Ainsi, des portées et des entre-axes sont définis, faisant naître un système de construction primaire et secondaire. Dans le cadre d’une réflexion qui porte sur la forme globale et sa constructibilité selon des critères justes, ce processus de subdivision de la forme globale est d’importance. Selon le type de surface de départ, le processus de subdivision peut être trivial ou au contraire insolvable géométriquement et par conséquent inconstructible. D’où l’importance de comprendre les propriétés géométriques de la surface de départ – propriétés qui conditionneront par la suite le modèle de subdivision. Varie également avec les modèles de subdivisions choisis la règle géométrique qui régit le rapport entre ces éléments, appelée « situation locale » dans les lignes qui suivent.
Nos recherches mènent à des solutions de construction novatrices qui peuvent être utilisées efficacement – une nouvelle architecture du bois. La menuiserie automatique est devenue une technique commune pour l’assemblage de poutres dans l’encadrement du bois et la toiture. Elle a relancé les articulations traditionnelles et intégrales telles que les connexions à la mortaise et aux tenons.
Seulement récemment, la fabrication automatique de joints d’ébénisterie traditionnels a été introduite pour l’assemblage de structures de coquilles de panneaux de bois. Les premiers prototypes ont utilisé de tels joints intégrés pour l’alignement et l’assemblage des composants, tandis que des collages supplémentaires ont été utilisés pour la liaison porteuse. Etant donné que les joints collés ne peuvent pas être assemblés sur le site, cela entraîne plusieurs contraintes de conception. Mais grâce à leur géométrie à degré unique de liberté (1DOF), ces joints bloquent le mouvement relatif de deux parties dans toutes les directions sauf une. Grâce aux joints à tenon pour les panneaux de placage stratifiés, on combine la résistance au cisaillement des joints de doigts avec une résistance élevée aux moments de flexion et à la traction du plan.
La configuration de la plaque basée sur le motif Miura-Ori permet de concevoir des structures de surface pliées à double courbure, conçues par la fabrication et l’assemblage. Alors que le motif de Yoshimura est contraint à cibler des surfaces à haute courbure et aboutit à de grandes tailles de plaque, le motif Miura-Ori peut également être appliqué sur des surfaces à faible courbure. Cependant, l’élévation verticale des sommets dans le Miura-Ori entraîne également certains inconvénients structurels.
Prof. Yves Weinand