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l'oie et l'architecture

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l'oie et l'architecture 1 faire un projet c'est formuler un thème avec des mots et créer des espaces penser verbalement et spatialement en même temps les deux actes sont simultanés entremêlés comme deux mains croisées: la main gauche sachant - à peu près ce que cherche la main droite mais pour dessiner il faut dénouer les mains c'est la malignité des comparaisons 2 j'en cherche une autre je choisis l'oie: par ses plumes c'est un oiseau quasiment littéraire les règles sont à l'architecture ce que les os sont à l'oie: le squelette n'était pas là avant l'oiseau ils ont grandi ensemble et la bête porte ses lois immanentes l'architecture en elle et non suspendues au cou comme un ordre dans ce cas l'architecture ou l'oiseau s'écroulerait par manque de consistance tu peux dévorer l'oie ou la manger avec recueillement et jeter les os qui ont beaucoup de poids mais peu de goût sous la table tu es alors habitant, utilisateur, public tu peux aussi jeter la viande sous la table et numéroter soigneusement les os pour reconstruire le squelette avec du fil de fer très fin tu es zoologue alors et, zoologue, tu peux tomber sur une oie qui ne sait pas voler ou prendre l'oie pour un canard le squelette reconstruit pour la loi du vivant tu es toujours zoologue alors tu peux dépasser ton bricolage avec les os et reprocher à l'oiseau mort de n'avoir pas de son vivant étalé sa roue comme un paon ou chanté comme un rossignol dans le buisson de lilas tu es toujours zoologue encore ces zoologues comment une oie aussi parfaite soit-elle pourrait-elle être l'oiseau accompli du zoologue? si cet oiseau parfait existait il ne serait même pas une oie imparfaite mais un parfait cauchemar à plumes quiconque a créé la première oie n'avait pas de livre de zoologie ils ne viennent qu'après et rarement les auteurs de livres de zoologie ont créé une oie voilà pour la zoologie et les chevaliers de la plume 90.IV

3 le style c'est la croissance ni désirs ni ordres n'y font il n'y a pas de principe général pour l'art de bâtir il y a eu des époques sévères avec des règles strictes la croissance devenait alors contrainte et les forêts pépinières dans la querelle du ' Cid ' l'académie l'emportait et Corneille devenait académicien le premier, naturellement, car il n'était pas seulement un élève obéissant mais surtout un homme génial les lois et règles prennent de l'âge les exceptions viennent au monde se multiplient et rendent visite aux règles pour fêter leur centenaire après leur mort on empaille les lois les traite à l'antimite et les fait recopier d'après nature par les jeunes quel abus de talents nous ne vivons pas une époque sévère quoiqu'on réclame des recettes à grands cris que le fait nous plaise ou pas: à peu près tout est faisable sauf un principe de construction unique, 2 ou 3 banalités aussi immortelles soient-elles ne font pas un catéchisme 4 ce n'est ni un faux-fuyant ni l'invitation à l'excès car il n'est pas question ici d'absence de lois s'il n'existe pas de loi universelle unique ni pour la dramaturgie ni pour l'architecture chaque projet a ses lois immanentes l'oie celles de l'oie le cheval celles du cheval c'est une déclaration de la liberté au singulier une liberté à responsabilité au singulier c'est une réformation sans réformateur et une réformation sans réformateur s'appelle évolution croissance 5 construire c'est créer des espaces pour vivre extérieurs et intérieurs où la vie peut déployer ses formes les plus variées l'œuvre est une composition l'architecte y joue sa part comme l'habitant et les hommes du chantier il accorde l'instrument à construire sans surestimer le premier programme

car la vie est un flux et reflux de forces dont il ne veut empêcher le jeu 6 mais il doit aussi soutenir la vérité intérieure de son projet créer l'ouverture sur le milieu ambiant il doit se plier à l'ordre spatial qu'il a provoqué lui-même sinon il tue son rêve chaque projet est un joug un état de contrainte qui l'a inventé? qui l'a créé? qui doit se plier? l'architecte - parce qu'il le veut plus tard quand il se redresse se retourne il lui arrive — rarement de n'en pas croire ses yeux il a réussi il s'émerveille il en a le droit car les merveilles sont rares presque aussi rares que les constructions réussies paraphrase d'un essai de erich kâstner